Jour d’élection
Dès potron-minet, j’ai été réveillé par cette exaltation particulière qui submerge tout bon citoyen à chaque matinée d’élection au Conseil fédéral. Un bircher-müesli vite avalé (je reste fidèle même si je regrette le temps où il y avait Werner Gunthör et Pierre Délèze sur les paquets), je me suis jeté dans mon canapé Ikea et ai posé mes pieds sur ma table basse bancale Conforama (je fais du name dropping, c’est mon côté Delerm). Puis, fébrilement, j’ai allumé mon poste. J’entends déjà vos quolibets, bande d’anars viscéraux : comment peut-on raisonnablement se passionner pour ce rituel suranné qui constate à remplacer des vieux conservateurs xénophobes par d’autres vieux conservateurs xénophobes? Ca doit être mon côté Waldtstatten. Je ne loupe aucune élection du Conseil fédéral depuis 30 ans. Et puis, comment ne pas trouver un charme impressionniste saisissant à la vue de cette coupole du Palais fédéral enneigée? Bon je vous l’accorde, cette fois, ça risquait d’être aussi excitant qu’un match de vétérans du FC Savièse. Le type responsable des campagnes haineuses ayant pollué le paysage politique helvétique ces dernières années était quasi-assuré de remplacer un casque à boulon moustachu au physique ingrat. Ben en fait je me suis pas ennuyé une minute. D’abord l’homme chargé de rendre sexy la politique à la télé, Alain Rebetez, était plus en forme que jamais. Gesticulant comme un pandore ivre faisant la circulation à l’Avenue de la Gare, les yeux aussi exorbités que Doris Leuthard, il a harponné plein d’invités ravis de distiller des fines analyses politiques (Jean-René a dit que prudence, rien n’était joué avant la fin). Le suspense était en effet au rendez-vous puisqu’un paysan UDC thurgovien a failli damer le pion à Ueli le cynique. Tout le monde était finalement heureux, la concordance (cette coquille vide) était respectée et Blocher politiquement mort. Couchepin a même réussi à faire son numéro, en houspillant des photographes (« de djeu, tout le monde dehors, es genügt »). Heureusement que ça a pas duré plus parce que je voulais pas louper un autre jeu télévisé suivi par les plus de 70 ans: « Motus » à 11h sur France 2 présenté par le sémillant Thierry Beccaro (aussi raciste que le nouveau conseiller fédéral avec sa propension à stigmatiser les boules noires).
Et maintenant, barrez-vous de mon Palais.
Jean Gauchat, politologue du dimanche
décembre 10th, 2008 à 14 h 18 min
Si j’avais su que Rebetez animait la surprise-party, j’aurai osé faire un effort pour trouver un poste de TV allumé…
décembre 10th, 2008 à 23 h 15 min
Oh oui, c’était du tout grand Rebetez! L’oeil qui ne cligne jamais tel un hibou en pleine nuit, l’oreille à l’affut du moindre son de cloche priant les brebis égarées à l’interview de bien vouloir regagner leurs fauteuils, le geste alerte prêt à empêcher une personne non-dûment interrogée de répondre à la place de l’ayant-droit…. Non, vraiment rien à redire, du grand art. En plus il a été aidé par le suspense.
Ah heureusement qu’il était là, sinon les élections ne seraient plus autant passionnantes et on ne pourrait plus rire en le voyant se faire remettre en place, comme à chaque fois, par Recordon.
Allez courage Alain…